[5-1] Plantes Carnivores

Trouver un prétendu sorcier n’est jamais très difficile, mais la magie vulgaire, en plus d’être foncièrement inesthétique, est d’une banalité assez affligeante. Les rituels en latins ou en araméen, les sacrifices, la plupart des Nobles en ont déjà fait. C’est salissant, parfois utile, souvent erratique, et de toute façon trop médiocre pour que ces esprits supérieurs prennent le temps de s’en souvenir. La plupart gardent quelques parchemins dans un fond de caisse au cas où, mais rares sont ceux à avoir une vraie maîtrise de la magie.
Pourtant, la magie humaine existe. Et comme les fleurs sont les plus élémentaires créations du Paradis, on trouve parfois parmi les herboristes et autre botanistes une sorte de confrérie occulte.

Kalten, fort de cette information, poussa la porte d’un fleuriste décrépit à l’étouffante odeur de moisissure, odeur qui n’arrivait tout de même pas à lui cacher les effluves magiques qui s’échappaient de l’arrière boutique. Une petite chinoise à la peau plus ridée que de l’écorce apparut derrière le comptoir.

J’enfonce profondément le chapeau sur la tête de Chen Pao et garde le col du manteau sale relevé sur son visage

« Bonjour Voisine,

J’inspire profondément

J’aime l’odeur de ta boutique, dommage que cette étouffante senteur sature l’air ambiant, mais je comprends qu’il faut savoir se montrer prudent.

Je laisse un blanc, pour évaluer l’ambiance et en profite pour me rapprocher de la petite femme.

Je voudrai envoyer une plante à une amie, mais j’ai perdu son adresse. J’aimerai lui faire parvenir une ronce, mais pas n’importe laquelle, une ronce forte, une plante noble.En réponse elle pourrait me dire si elle est heureuse ou elle se retrouve. Elle pourrait me dire si elle veut revenir et, à nouveau, l’accueillir.

Comme je suis assez pressé, je vous propose de ne pas essayer de tuer le temps, il est trop puissant, et d’en venir tout de suite au prix sans faux semblants sur ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. »

« Je me disais bien que vous n’aviez pas la tête à m’acheter un bouquet… » répondit-elle dans un Chinois parfait. Nerveuse, elle tripotait quelque chose dans sa poche. « On peut parler aux esprits des ancêtres une fois qu’ils ont dépassé les mondes du Yomi, c'est-à-dire une semaine après leur mort, et à condition que les 99 bêtes ne l’aient pas dévoré. »
Elle déglutit « quant à faire vivre après la mort… quand je vois le parchemin cloué sur votre front… je me dis que vous savez déjà comment faire. »

« Ha ! » ricana t’elle, un moyen comme un autre de cacher sa nervosité « ils veulent tous des réincarnations… ils regardent un film à la télévision et ils s’imaginent que c’est facile… ce genre de prodiges n’arrive qu’une fois tous les milles ans, alors si vous connaissez quelqu’un en mesure de le réaliser et qui soit assez généreux pour passer son tour, dites le moi, je serai ravie de retrouver mes vingt ans ! »

Je me renfrogne un peu devant l'apparente moquerie de la petite chinoise.

"Ecoute, Voisine, je ne suis pas très au fait de ce que tu considères comme étant réel ou non. En plus, et comme je l'ai déjà dit, mon temps m'est précieux et j'ai besoin de réponses. Commence par me raconter tes hitoires de Yomi et de bêtes.
Ensuite, j'ai longtemps été lié à cette personne peut être pourrions nous combiner nos compétences pour la contacter Yomi ou non.
Enfin, je sais, d'expérience, que rien n'est impossible pour qui a les moyens, alors annonce moi ce dont tu as besoin."

J'inspire profondément, malgré la mort du corps de Chen Pao ce dernier a gardé des réflexes typiquement humain, une bonne respiration pour une sérénité retrouvée.

« Durant la semaine d’ascension, elle va oublier. Si quelqu’un prend contact avec elle, si elle se souvient, alors elle aura trop de peine pour quitter le monde physique, et elle deviendra un spectre errant pour l’éternité. »

La vieille gémissait presque, quelque chose la terrorisait.

Je regarde par dessus l'épaule de Chen Pao

"Qu'est ce qui te fais peur ?

« Rien du tout, cette bonne blague ! J’ai l’habitude des Zombis qui viennent parler magie, vous pensez bien… »

Dans sa poche, sa main s’agitait à triturer quelque chose, presque sans s’en rendre compte.

Parlant sérieusement.

"Bon et bien tant mieux, car tant que je n'ai pas régler quelques problèmes cette enveloppe sera votre unique interlocuteur sur le sujet"

Elle fondit en larmes…

« Je vous en prie… ne me le prenez pas… j’ai bientôt 87 ans, je n’en ai plus pour très longtemps… c’est tout ce qui me reste…je vous en prie… »

Faisant de grands yeux ronds !

"Prendre, qui ? Quoi ? Pourquoi ?
Explique toi, je suis là pour te demander un service en contre partie de quoi tu auras le droit de m'en demander un ! D'ailleurs tu ne m'as toujours pas donner ton prix.

J'adouci le ton autant qu'il m'est possible sans tomber dans la caricature.

"Je crois que nous sommes parti sur de mauvaises bases. Raconte moi ton problème."

La petite vieille déglutit, et retira lentement la main de sa poche. Elle tenait une graine de Kata, plante magique du monde d’Alenaman qui ne fleurit qu’une fois par siècle, capable du prodige de la renaissance.

Elle hocha lentement la tête, reprenant un peu confiance.

« Il faut mettre la graine dans sa bouche, et enterrer le corps au pied d’une source naturelle. Un arbre pousse, et au bout d’un an et un jour il naîtra de l’écorce la réincarnation de ta Dame.

Mais Aldenaman est un lieu dangereux Seigneur… »

Aldenaman est l’un des mondes d’Yggdrasil. Autrefois vallée verdoyante, il était le refuge des plus parfaites créations du Démiurge. L’homme et la femme vivaient alors à l’ombre de l’arbre de l’éternité…